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Les méthodologies déconstructionnistes et la question de l'unité du bogomilo-catharisme

Théofanis L. Drakopoulos

Illi vero qui combusti sunt, dixerunt nobis in defensione sua, hanc haeresim usque ad haec tempora occultatam fuisse a temporibus martyrum, Graecia, et quibusdam aliis terris. Evervin de Steinfeld, PG 182, 679 d.

Déconstructionnisme

Après plus d'un siècle de recherches historiques ayant donné lieu à une bibliographie imposante sur le mouvement bogomilo-cathare, ces dernières décennies ont vu l'unité de ce mouvement remise en question, suscitant ainsi à la fois des débats acharnés dans les milieux académiques et un bipolarisme reposant sur des enjeux idéologiques. La question primordiale sur ce phénomène religieux qui partage les historiens de nos jours pourrait être formulée comme suit : Les adeptes des mouvements bogomile et cathare des 12 e et 13 e siècles avaient-ils conscience d'appartenir à la même communauté religieuse au niveau liturgique, doctrinal et administratif, comme nous le laissent supposer plusieurs ouvrages de la littérature antihérétique du moyen âge ainsi que les sources d'origine hérétique - ou s'agit-il d'un concept imaginaire minutieusement élaboré pendant plusieurs siècles par un milieu d'hérésiologues médiévaux?

Ce dilemme n'a été mis en évidence de manière systématique qu'à partir des années 70. Jusqu'à cette époque, nous constatons l'unanimité des milieux académiques concernant l'unité du mouvement bogomilo-cathare ou au moins l'examen du catharisme en tant que branche occidentale du bogomilisme. En effet, des historiens renommés du mouvement relevèrent avec une insistance particulière les fortes influences que le bogomilisme a exercées sur le catharisme, en analysant ce dernier comme un mouvement homologue du bogomilisme, formé en Occident un ou deux siècles postérieurement lors des croisades ou des activités missionnaires des bogomiles 1. Cette conclusion évidente ressort d'une lecture positiviste des sources polémiques de l'église catholique romaine 2 ainsi que de peu nombreuses sources directes d'origine hérétique 3. Plus précisément, nous constatons que pendant les années 40, les assez nombreuses études de référence sur le bogomilisme qui eurent lieu 4, ainsi que les découvertes du Père A. Dondaine d'ouvrages d'une importance capitale sur l'expansion du catharisme en Lombardie 5 rendirent possible une mise en parallèle approfondie des <deux> branches du mouvement. La conclusion unanime qui dérivait de cette approche positiviste des sources était que le catharisme a subi des influences déterminantes dans tous les niveaux de sa vie religieuse (doctrinal, administratif, liturgique) du bogomilisme.

A l'exception de R. Morghen - le premier à contester les influences du bogomilisme en considérant le catharisme comme un mouvement purement occidental 6, mais dont les théories n'ont pas trouvé d'écho parmi les historiens des années 50-, ce n'est qu'à partir des années 70 qu'une deuxième école historique lance une nouvelle méthodologie d'approche, exclusivement du catharisme cette fois (excluant le bogomilisme), en appliquant une analyse plutôt sociologique que religieuse du phénomène . Ainsi, l'analyse comparée au niveau religieux de «deux» branches du mouvement passe au second plan et dorénavant l'intérêt scientifique s'oriente graduellement vers les cadres socio-économiques des sociétés occidentales dans lesquelles est apparu le catharisme. Le précurseur de cette tendance que fut Robert Moore focalise ses études 7 exclusivement sur la documentation anti-cathare en la considérant dans son ensemble comme un effort du clergé catholique romain de renforcer l'autorité ecclésiastique et de monopoliser le message du christianisme en proscrivant parallèlement les marginaux de la société médiévale. De cette façon, il se penche en principe sur l'évolution des structures de l'Eglise Catholique Romaine ainsi que sur les mécanismes qui mettent en avant le pouvoir papal. Selon R. Moore, l'accusation d'hérésie au moyen âge fonctionnait plutôt comme une sorte de stigmatisation des classes sociales qui ne s'alignaient pas sur la vision du pouvoir papal. Ainsi, le terme <dissidence> va remplacer à l'usage de l'historiographie moderne le terme gênant <hérésie>, pour décrire un phénomène plutôt social que religieux dont l'apparition pourrait de cette façon être expliquée exclusivement par les cadres sociologiques, idéologiques et économiques d'une certaine société locale dans une certaine période.

La méthodologie de R. Moore donna naissance à une école, en principe francophone, qui l'adopta de manière beaucoup plus radicale, l'école déconstructionniste . Bien que le nombre de déconstructionnistes demeure restreint, grâce à leurs études volumineuses ainsi qu'à leur analyse innovatrice du phénomène, cette école est devenue essentielle pour les études du catharisme. Parmi les plus brillants représentants du déconstructionnisme, il faut évidemment mentionner J. L. Biget 8, M. Zerner 9 et U. Brunn 10 car, mise à part leur forte présence dans la bibliographie moderne, ils restent parfaitement alignés au pied de la lettre de la méthodologie déconstructionniste. Avec leurs études et articles, ils ont réussi à réorienter l'intérêt scientifique vers les motifs de la documentation anti-cathare ainsi que les fermentations spirituelles et l'évolution administrative de l'Eglise catholique qui ont eu lieu à l'époque de l'apparition du catharisme. Cependant, cette école accentue démesurément l'attachement des chercheurs aux sources polémiques latines, en montrant en parallèle leur méfiance à l'égard des sources directes d'origine hérétique et une méconnaissance inexplicable du bogomilisme. De cette façon, en excluant la littérature antibogomile byzantine 11, les déconstructionnistes rejettent toute sorte de comparaison entre les  «deux» branches du mouvement, en refusant a priori l'hypothèse généalogiste, sans se mettre en peine de l'examiner. De plus, ce qui est beaucoup plus étonnant, n ous le dirons le paradoxe du déconstructionnisme et son inconvénient méthodologique, c'est le fait qu'au lieu d'analyser les sources directes du catharisme afin de d é couvrir la nature profonde du mouvement, les déconstructionnistes préfèrent le faire en déconstruisant la littérature polémique d'origine catholique romaine. Leur point de départ est ainsi caractérisé par une attitude négativiste: e n prenant comme une donnée l'idée que la documentation antihérétique est une construction imaginaire de l'église catholique, ils procèdent à sa déconstruction radicale qui les amène finalement jusqu'à la déconstruction de l'hérésie elle-même, comme nous le verrons.

Les enjeux idéologiques Les études du catharisme ne sont pas dépourvues d'une connotation idéologique. A notre avis, l'analyse déconstructionniste du corpus anticathare d'origine catholique nous semble être dictée par une position négative envers l'église catholique à cause de son passé historique, marqué par des épisodes sanglants comme les croisades contre les hérétiques médiévaux ou les guerres religieuses contre les protestants. De ce point de vue, ce n'est pas un hasard si nous constatons que souvent la position des historiens envers la documentation anticathare est dictée par leur credo religieux. Ainsi, à cause du fait que la littérature anticathare provient du milieu catholique, les historiens en principe catholiques attribuent aux sources une certaine véracité historique 12 bien que des historiens protestants y entrevoient une propagande minutieusement élaborée par l'Eglise Catholique romaine afin de stigmatiser toute forme de dissidence, en avancent une explication qui dérive d'un passé historique traumatisant lors de la guerre religieuse entre les catholiques et les protestants. Il est très significatif que certains chercheurs considère nt la polémique contre les cathares comme identique à celle qu'a lancée le clergé catholique contre les protestants 13. D'ailleurs, l'hypothèse selon laquelle les cathares sont les ancêtres des protestants a été mise en avant par les premières communautés protestantes et influence jusqu'à nos jours la position des chercheurs modernes envers les sources anticathares 14.

Les enjeux idéologiques qui dérivent d'une position positiviste ou déconstructionniste envers les sources anticathares de la littérature catholique ont écarté la discussion sur le catharisme des sources directes mais aussi de la littérature polémique des auteurs byzantins contre le bogomilisme. A notre avis, la méthodologie différente que les historiens des deux écoles appliquent à la littérature polémique ne s'insère pas seulement dans les cadres strictement académiques de ces écoles historiques bien différentes, mais surtout est dictée par une tonalité assurément idéologique, ce qui explique d'ailleurs la ré orientation du débat actuel vers une autre question, plus précise : Les informations fournies par les hérésiologues médiévaux correspondent-elles à la nature profonde de l'hérésie ou s'agit -il d ' une construction imaginaire ? La réponse à cette nouvelle question, mise en avant par les déconstructionnistes a eu comme résultat une bipolarisation parmi les historiens, exprimée par l'adoption d'un côté d'un positivisme en vers la documentation polémique contre les hérésies dualistes et de l'autre d'un déconstructionnisme. Cette unilatéralité de l'intérêt scientifique pour la documentation polémique a eu comme conséquence à partir des années 80 de ne plus avoir des  études approfondies sur les sources directes qui sont parvenues à notre disposition (d'origine sans doute dissidente). Ainsi, nous constatons que la grande majorité des études sur les sources directes ont été rédigées avant les années 80 15 bien que la dernière étude exhaustive remonte justement à 1980 16. De ce point de vue, nous constatons que trop souvent les études modernes se bornent aux références superficielles des sources directes en rendant ainsi leur rôle secondaire, sans donner l'importance qui convient au système doctrinale et liturgique du bogomilo - catharisme. Ainsi, ces dernières décennies, les historiens du catharisme se concentrent de plus en plus sur la parole antihérétique et l'évolution institutionnelle de l'Eglise en mettant ainsi plus l'accent sur les hérésiologues médiévaux et les institutions ecclésiastiques, que sur l'hérésie elle-même. Parallèlement, le débat de la part de déconstructionnistes se radicalise. En effet, en déconstruisant la documentation anticathare, ils en sont arrivés jusqu'au point de nier l'existence de l'hérésie.

Les trois principes méthodologiques de l'école déconstructionniste Pour mieux saisir l'optique de l'école déconstructionniste 17 et expliquer ses conclusions de la «non existence du catharisme», nous considérons inévitable d'exposer dans ce contexte quelques axiomes dont l'adoption amène à cette théorie catharisme et constater leur inconvenance :

i) déconstruction de la documentation anticathare : Comme nous l'avons déjà noté, malgré le fait que les déconstructionnistes utilisent presque exclusivement le corpus antihérétique d'origine catholique romaine pour déchiffrer la vraie nature du catharisme, ils le considèrent dans son ensemble comme une construction proprement imaginaire qui a eu comme but le renforcement de l'unité ecclésiastique sous le pouvoir papal. A. Brennon parle justement d'une hypercritique envers les sources 18, nous ajouterons hyperbolique et dictée par un négativisme. Voyons par exemple en grandes lignes la critique que J. L. Biget exerce sur l'école positiviste: Pour lui, ne prendre aucune distance à l'égard des sources (antihérétiques) c'est un positivisme acritique 19. La conséquence d'un tel positivisme c'est l'usage généralisé des termes 'cathares', 'catharisme', terminologie arbitraire appliquée à l'ensemble de la dissidence européenne. L'application d'une telle méthode travestit la réalité à l'égal du discours des clercs médiévaux, car à son avis l es accusations portées contre les hérétiques ne correspondent par à la réalité. La littérature polémique dans son ensemble est une répétition mécanique qui ne s'applique pas à une réalité, mais relève du schéma préconçu alors que le clergé répète un discours contre les manichéens 20. Ainsi, malgré l'existence de plusieurs groupes hérétiques, le clergé catholique tente de présenter une hérésie unique en adoptant une organisation pareille à celle de l'Eglise. De cette façon, ils déforment la vraie image de la dissidence en la faisant apparaître comme une Contre - Eglise menaçant la chrétienté, justifiant ainsi une croisade contre les hérétiques. En revanche, pour pénétrer au plus profond de la dissidence , il convient de déconstruire le discours des clercs médiévaux qui dénaturent la dissidence 21. En suivant ainsi cette logique, la déconstruction de sources s'avère la seule méthode d'approche de la vraie nature de la dissidence. Quand aux sources directes d'origine hérétique, les déconstructionnistes s'avèrent beaucoup moins prolixes. Ce n'est qu'avec les Actes du concile du Saint Félix de Lauragais qui en traitent 22- texte d'importance unique à propos des relations entre les bogomiles et les communautés cathares au niveau administratif - pour argumenter qu'il s'agit d'une forgerie du 16 e siècle. En revanche, dans leurs études les références aux autres sources directes sont trop peu nombreuses et leur usage superficiel. Aucune analyse profonde du Rituel Cathare (la vie liturgique des bogomilo - cathares), du Liber de Duobus Principiis (la polémique des dualistes radicaux contre les dualistes mitigés), ou même de l'Interrogatio Iohannis (la cosmogonie et la sotériologie bogomilo -cathare ), tous les trois d'origine incontestablement hérétique, mais sans intérêt sociologique.

Voyons si leur préférence pour la littérature anticathare justifie leur théorie d'après laquelle il s'agit d'un schéma préconçu et une construction imaginaire du clergé catholique. Les déconstructionnistes pourraient découvrir que leur approche vient en contradiction après une mise en parallèle d'informations fournies aussi par la littérature antibogomile, rédigée par des clercs mais aussi des laïcs byzantins du 10 e au 12 e siècles, soit un ou même deux siècles avant la littérature anticathare . Il n'est pas sans importance de remarquer que dans leurs études et articles sur l'hérésie il n'y a pas de références aux traités antihérétiques d'importance capitale comme ceux d'Euthyme Zigabène ou d'Euthyme de la Peribleptos, une omission qui à notre avis constitue un inconvénient de la méthodologie déconstructionniste. Au contraire, ils reprennent de façon fragmentaire quelques remarques générales sur le bogomilisme. A notre avis, les déconstructionnistes évitent de mettre en comparaison les deux corpus de textes antihérétiques car de cette façon ils ne pourraient qu'être amenés à un dilemme crucial: soit l es deux corpus polémiques (byzantin-latin), indépendants entre eux, nous offrent des informations identiques à propos des hérétiques et par corollaire sont fiables, soit les sources latines ont adopté la parole antihérétique byzantine, articulée au moins un siècle et demi antérieurement. Mais, comme nous le verrons, d'après leur deuxième principe du localisme selon lequel il n'y avait pas d'interactions entre les deux mondes (Orient- Occident ) ou osmose des idées, ils ne pouvaient qu'en arriver à réfuter la deuxième hypothèse.

 

II) Le principe du localisme : En appliquant des analyses sociologiques, les d éconstructionnistes essaient de faire cadrer la dissidence dans les contextes sociaux et politiques d'une société locale ainsi que par rapport aux transactions entre papauté, cisterciens et aux forces politiques. De cette façon ils nient aussi l'unité du catharisme et procèdent à une analyse qui se limite en principe à la région d'Albi (J. L. Biget, M. Zerner 23) et à la Rhénanie (U. Brunn 24). En suivant cette méthodologie, ils n'écrivent plus d'histoire du catharisme, mais des mouvements dissidents régionaux en marquant leurs études d'un esprit de localisme . Cette manière d'analyse est dictée par leur conviction qu'une société est un système autarchique qui peut être analysé sans recourir aux influences exogènes. L'analyse d'un système régional est suffisante pour expliquer tous les phénomènes qui apparaissent dans ses cadres socio- historiques en considérant ainsi la dissidence comme une réalité entièrement endogène 25. De cette façon ils nient non seulement l'unité du bogomilo-catharisme, mais aussi du catharisme occidental. Face à l'universalité de la dissidence projetée par la documentation antihérétique médiévale (afin de la présenter comme une contre-Eglise qui menace la chrétienté) mais aussi face aux positivistes historiens qui supposent une origine orientale du phénomène, les déconstructionnistes décrivent la dissidence comme une réalité locale qui se différencie d'après les contextes sociaux de chaque région.

Pourtant, mis à part la dénomination «cathares», utilisé par les hérésiologues pour présenter une hérésie universelle d'après les déconstructionnistes, le clergé catholique n'hésitait souvent pas à préciser en même temps leur origine géographique, raison pour laquelle ils utilisent aussi des termes comme «albigeois», «bougres», «garattenses», «concorrenses» etc. sans jamais les confondre avec les «vaudois» qui ne faisaient pas partie des hérésies dualistes. Derrière le terme «cathare s» les hérésiologues entrevoyaient une famille religieuse d'orientation dualiste, sans omettre de la distinguer en deux parties (dualistes modérés et radicaux), un fait qui correspond parfaitement à la réalité comme nous le constatons grâce au Liber de duobus principiis . Si nous constatons des différenciations au niveau doctrinal, les éléments unifiant les cathares sont leur croyance d'appartenir à la vraie église de Dieu en revendiquant la succession apostolique et surtout le type de leur vie liturgique. Tant les bogomiles que les cathares indépendamment des régions s'opposent à l'Eglise chrétienne (orthodoxe -catholique ) 26 et conçoivent leur église comme universelle, d'après les passages du Rituel latin de Florence ou les hérétiques évoquent leur Eglise en la qualifiant comme la gleisa de Dio 27. Les déconstructionnistes n'analysent pas cette conscience des hérétiques d'appartenir à une communauté qui dépasse les limites locales, une constatation incontestablement en contradiction avec le profil local qu'ils construisent pour la dissidence en Albi ou en Rhénanie. De même, ils s'abstient de tout commentaire à propos de l'utilisation par tous les dissidents en dépit de leurs désaccords doctrinaux (dualistes radicaux - mitigés) du baptême spirituel ( consolamentum ) dont la forme liturgique qui nous est parvenue en trois versions dépend du rite du baptême spirituel des bogomiles décrit par Euthyme de la Peribleptos et Euthyme Zigabène. Il n'est pas sans importance que les hérétiques se basaient sur le même raisonnement théologique 28. De plus, dans leur vie liturgique la seule prière que les deux " branches " reconnaissaient est le Pater Noster, une position qui se fondait également sur une argumentation identique 29. Il ne faut pas omettre de mentionner aussi l'usage et l'ampleur qu'a connus le livre secret des cathares , Interrogatio Iohannis, importé de la Bulgarie et traduit en latin vers 1190 par les cathares de Lombardie 30. En prenant en compte les éléments unifiants les «deux» branches du mouvements et en restant fidèles en même temps à l'axiome déconstructionniste que les cadres socio-politiques précèdent et forment des croyances dissidentes, la question qui dérive semble être plutôt rhétorique: Pourrions-nous prétendre que les cadres sociopolitiques de Rh énanie ou d'Occitanie furent les mêmes que ceux de Bulgarie ou de Byzance un ou deux siècles aupavant pour former un système de croyances dualistes presque identique ? Si oui, pourrions-nous prétendre que certains cadres sociologiques donnent naissance à un système de croyances similaires ? Or, une réponse affirmative à cette question nous semble dénoter un positivisme radical et acritique.

 

iii) L'accentuation de l'anticléricalisme et de l'évangélisme fondamentaliste au détriment du dualisme Les déconstructionnistes, en laissant de côté leur théorie qu'une société locale fonctionne comme un système autonome, analysent les contextes sociaux à la lumière d'un facteur exogène : l'évolution institutionnelle de l'Eglise catholique, en considérant comme arbitraire une dichotomie absolue entre la religion et la société 31. En liant strictement l'hérésie avec l'Eglise, ils en arrivent à un nouvel axiome  : le catharisme n'est qu'une construction idéelle qui résulte non seulement de la situation politique mais aussi de l'évolution institutionnelle de l'Eglise 32. D'après les déconstructionnistes, l es origines de la dissidence se trouvent dans l'évangélisme de l'an mil lequel était renforcé par la réforme grégorienne 33. D'après eux, l a dissidence sous la forme dualiste n'est que le résultat d'un renforcement de l'anticléricalisme qui, lors des années 1140 -1170, est devenu plus radical. De cette façon ils entrevoient une continuité dans le mouvement anticlérical qui constitue la base commune et le facteur unifiant de tous les mouvements dissidents du moyen âge qui précède tout sorte de spéculations doctrinales. Cette approche explique pour quelle raison les premières dénonciations contre une dissidence de credo dualiste ne remontent qu'en 1165. Les déconstructionnistes semblent être convaincus que les auteurs des sources polémiques essaient de présenter l'anticléricalisme des dissidents comme la conséquence de leur foi erronée. Ainsi, pour J. L. Biget, il faut se demander s'il ne s'agit pas uniquement d'une façon de désamorcer cet anticléricalisme en le disqualifiant. Pour lui, la question est de savoir si la logique des traités est bien conforme à la réalité et si le dualisme dénoncé possède un caractère effectif ou procède d'une construction par les clercs 34. En aboutissant à une hypothèse très ambiguë  ( les dissidents se conforment à l'opinion de leurs adversaires qui les désignent comme manichéens) il considère que l'anticléricalisme se mue en dualisme, par l'effet d'une double construction  : celle des clercs et celle des dissidents eux-mêmes. Ainsi, J. L. Biget fait aussi entrer dans son analyse originale des mécanismes psychologiques agissant dans cette réaction réversible 35.

Pourtant, dans l'hypothèse où l'anticléricalisme serait la cause principale de l'apparition du catharisme, comme c'est aussi le cas des vaudois, cela n'explique pas pour quelle raison une grande branche de cet anticléricalisme a adopté des doctrines dualistes alors qu'une autre comme celle des vaudois reste fidèle aux doctrines de l'Eglise catholique. Les déconstructionnistes considèrent l'anticléricalisme comme point de départ de la dissidence médiévale en Occident, construisant de cette façon une unité que, dans le cas de la dissidence dualiste, ils refusent de reconnaître. Nous ne voyons pas pour quelle raison l'anticléricalisme pourrait unifier des sociétés bien différentes entre elles au niveau sociohistorique, bien que quand les déconstructionnistes se réfèrent à la dissidence dualiste, ils insistent sur son caractère régional. Ils prennent arbitrairement comme identique la parole anticléricale adoptée par les vaudois et les dissidents dualistes, bien qu'il y ait de grandes différences, dictées par leur différente orientation doctrinale. La critique que les dissidents dualistes exercent à l'égard de l'Eglise est très radicale et n'a pas de points communs avec celle des vaudois. Les cathares, comme leurs homologues en Orient, les bogomiles, ne limitent pas leur critique à la morale du pr être qui confère un sacrement. Ils revendiquent la succession apostolique et le vrai message de l'Evangile en dénonçant l'Eglise chrétienne comme restant attachée à ce monde matériel qui est le royaume du diable. Déjà en 1143, d'après le témoignage d'Evervin de Steinfeld, les dissidents dualistes de Rhénanie dénoncent le clergé catholique romain comme « amateurs du monde » ( mundi amatores) et pseudo-apôtres (pseudoapostoli) 36. De plus, l a critique des bogomilo-cathares ne se limitait pas aux critères moraux de celui qui conférait les sacrements, comme le faisaient aussi les vaudois, mais aussi aux types des sacrements. En effet, mis à part la morale du clergé, les h érétiques mettaient en doute l'efficacité des mystères sous la forme adoptée par l'Église chrétienne. Ainsi, même un baptême conféré par un prêtre moral n'était pas efficace pour le baptisé, car le rite ne correspondait pas à sa forme primitive. Il en allait de même pour le Sacrifice qui tant pour les bogomiles que pour les cathares n'avait pas été institué par le Christ 37. Car pour les bogomilo-cathares le pain béni à chaque repas symbolise la parole du Christ, assimilée à la prière Pater noster, et le vin à la lecture du Nouveau Testament 38. En conclusion, en dépit des théories déconstructionnistes, les hérétiques critiquaient le clergé sous un double aspect : l'invalidité du sacrement conféré par un membre du clergé simoniaque ou immoral et, plus généralement, l'inefficacité des rites adoptés par l'Église en se basant sur une argumentation théologique bien solide et identique entre les «deux» branches.

*

Nous pensons que les trois principes qu'on vient d'exposer sont issus d'une radicalisation du déconstructionnisme au fil du temps : d'une «révision» des sources polémiques, il est passé à la déconstruction radicale non seulement de la documentation polémique mais aussi de l'hérésie médiévale. L'hyperbole négativiste qui caractérise son approche des sources amène à la conclusion de la " non - existence du catharisme " ou la dévalorisation de la dissidence en un phénomène local, en déconstruisant ainsi le sujet des recherches sur l'hérésie médiévale. Laissant de côté l'aspect radical du déconstructionnisme, nous considérons que, en mettant en avant une «révision» des sources, cette école a à ses débuts enrichi les études du catharisme par son esprit de critique, toujours indispensable pour un dialogue fécond au niveau académique. A notre avis, si le positivisme historique constitue la thèse prédominante pour les études bogomilo - cathares, le déconstructionnisme dans sa première forme pourrait jouer le rôle de l'antithèse innovatrice, indispensable pour réussir une synthèse féconde sur ce phénomène extrêmement compliqué. En effet, l' analyse profonde des cadres sociologiques et historiques pourrait se montrer très utile pour l'historien afin d'expliquer les spécificités locales du phénomène ainsi que l'écho différent qu'a connu la dissidence dans tel ou tel région. Toutefois, l'historien des hérésies médiévales devrait à notre avis considérer que le fait d'appliquer uniquement cette méthodologie amène à une focalisation unilatérale, surévaluant les spécificités locales comme facteurs de l'apparition de la dissidence. De cette façon, une pareille méthodologie tend à faire oublier l'unité du phénomène - en fonctionnant comme l'arbre qui cache la forêt - si on ne la met pas en parallèle avec une comparaison exhaustive au niveau théologique des expressions locales de la dissidence. En revanche, en recourant en même temps qu'à la méthode sociohistorique, à une analyse théologique, nous pourrions parvenir à la forêt, c'est-à-dire à la dissidence dualiste en tant que phénomène dispersé dans une grande partie de l'Europe qui a suscité la rédaction de copieux volumes de traités polémiques. Car l'application exclusive de la méthode sociohistorique, se faisant sans prendre en compte le système métaphysique qu'une analyse théologique pourrait mettre en évidence, accentue l'esprit du localisme. Il est indispensable de faire entrer en jeu, en parallèle avec la méthode sociohistorique, également une analyse théologique-philologique afin d'analyser exhaustivement les points unifiant la dissidence dualiste au moyen âge.


1 Parmi d'autres études nous renvoyons le lecteur aux suivantes: C. Schmidt, Histoire et doctrine des Cathares, Paris-Genève, 1848, réimp. Ed. Harriet; I. V. Döllinger, Beiträge zur Sektengeschichte des Mittelalters, vol. I, Geischichte der gnostisch-manichäeischen Sekten, vol. II, Zweiter Teil; Dokumente vornehmlich zur Geschichte der Valdesier und Katharer, München, 1890, réimp. New York; A. Dondaine, « Les actes du Concile Albigeois de Saint -Félix de Caraman. Essai de critique d'authenticité d'un document médiéval », Miscellanea Giovani Mercati, t. V., Studi e Testi, 125, Roma, 1946; Puech .C, Vaillant A ., Le traité contre les Bogomiles de Cosmas le prêtre, Paris, 1945, éd. Droz; Obolensky D., The Bogomils, A study in Balkan Neo-Manichaeism, Cambridge, 1948, éd. University Press; M. Dando, Les origines du catharisme, Paris 1967, éd. Les éditions du pavillon; Anguélov D., Le Bogomilisme en Bulgarie, Toulouse, 1972, éd. Privat; Ivanov J., Livres et légendes bogomiles (Aux sources du Catharisme), Paris, 1976 (trad. du bulgare), éd. Maisonneuve et Larose. M. Loos, Dualist Heresy in the Middle Ages, Prague 1974, éd. Academia ; Śanjek F., Les chrétiens bosniaques et le mouvement cathare. XII-XV siècles, Paris -Louvain, 1976, éd. Diffusion; B. Hamilton, Monastic Reform, Catharism and Crusades, London 1979, éd. Variorum Reprints; J. Duvernoy, La religion des cathares, Toulouse 1976, éd. Privat; L'histoire des cathares, Toulouse 1979, éd. Privat ; E. Bozoky, Le livre secret des cathares, Interrogatio Ioahannis, Apocryphe d 'origine bogomile, Paris 1980, éd. Beauchesne, 2 e  édition Paris 2009, éd. Beauchesne; M. Barber, The Cathars, Oxford 1998, éd. Blackwell; A. Brenon, Le choix hérétique, Cahors 2006, éd. La Louve ; C. Taylor, Heresy in Medieval France, Dualism in Aquitaine and the Agenais 1000-1249, London 2005, éd. Boydell Press. B. Hamilton, J. Hamilton and S. Hamilton, Hugh Eteriano, Contra Patarenos, Brill- Leiden- Boston 2004, éd. The Medieval Mediterranean vol. 55.

2 Cf. principalement les œuvres suivantes : Anselme d'alexandrie Tractatus de hereticis, éd. A. Dondaine, « La hiérarchie cathare en Italie » II, AFP XX (1950), p. 308-324. De heresi catharorum in Lombardia , éd. A.Dondaine, «  La Hiérarchie cathare en Italie » I, AFP XIX (1949), p. 306-312. Evervin de Steinfeld , Epistola ad S. Bernardum, PL 182, col. 676-680 ; Raynier Sacconi , Summa de Catharis et Pauperibus de Lugduno, éd. A. Dondaine, U n traité néo-manichéen du XIIIème siècle, Paris, 1939, p 64-78: AFP XLIV (1974), p. 31-60.

3 Le livre secret des Cathares, Interrogatio Iohannis, Apocryphe d'origine bogomile, éd. E. Bozoky, Paris, 1980; Rituel Cathare, éd. Thouzellier C., SC 236, Paris, 1977 ; Jean de Lugio , Liber de duobus principiis, Un traité néo-manichéen du XIII ème siècle, éd. A. Dondaine, Rome, 1939 ; Le livre des deux principes, éd. Thouzellier C., SC 198, Paris, 1973; « Les actes du Concile Albigeois de Saint -Félix de Caraman. Essai de critique d'authenticité d'un document médiéval », A. Dondaine Miscellanea Giovani Mercati, t. V., Studi e Testi, 125, Roma, 1946.

4 Cf. Obolensky D., The Bogomils, A study in balkan Neo-manicheism, Cambridge, 1948; Runciman S., The Medieval Manichee. A Study of Christian Dualist Theory, Cambridge, 1947 et surtout l'étude des Vaillard. A, Puech H. C .,  Le traité contre les Bogomiles, Paris, 1945 traduction et analyse du traité de Cosmas le Prêtre , Slovo na eretiki, publié pour la première fois par M.G. Popruzenco ( Odessa, 1907).

5 «Un traité néo- manichéen du XIII e siècle. Le «Liber de duobus principiis» suivi d'un fragment de Rituel cathare», Rome 1939 ; De heresi catharorum in Lombardia , éd. A. Dondaine, «La Hiérarchie cathare en Italie » I, AFP XIX (1949), p. 306-312 ; Anselme d'alexandrie Tractatus de hereticis, éd. A. Dondaine, « La hiérarchie cathare en Italie » II, AFP XX (1950), p. 308-324.

6 Raffaelo MORGHEN, Medioevo christiano, Bari, éd. Laterza, 1951; «Problèmes sur l'origine de l'hérésie au moyen âge», Revue historique 236, Paris, 1966, p. 1-16 .

7 The Birth of Popular Heresy, London, 1975, éd. E. Arnold ; The Origins of European Dissent, London 1977, éd. A. Lane 1985 ; The Formation of a persecuting society : Power and Deviance in Western Europe, c.1100-1179, Oxford 1987; " Nicétas, émissaire de Dragovitch, a- t-il traversé les Alpes ?", Annales du Midi (1973), p. 85- 90 ; «Á fterthoughts on the Origins of European Dissent », dans Heres y and the Persecuting Society in the Middle Ages: essays on the work of R. Moore, dir. Frassetto M., Leiden-Boston- Brill, 2006, p. 291-326.

8 Parmi d'autres cf. : « Mythographie du catharisme », dans Historiographie du catharisme, Cahiers de Fanjeaux 14, 1979, p. 271-359 ; «Hérésie, politique et société en Languedoc (v. 1120 -1320v. )»; «Le pays cathare, Les re ligions médiévales et leurs expressions méridionales», dir. Jacques Berlioz, Fanjeaux (1998), p. 17 -64; «Les Albigeois. Remarques sur une d é nomination», dans Inventer l'hérésie? Discours polémiques et pouvoirs avant l'inquisition, Nice 1998, éd. Faculté des Lettres p. 219 -255; « Un faux du XIII ème siècle ? Examen d'une hypothèse  », dans M. Zerner dir.,  L'Histoire du Catharisme en discussion, Le concile de Saint- Félix (1167)  , Collection du Centre d'Études Médiévales de Nice, v.III, 2001, p. 105-133. Hérésie et inquisition dans le midi de la France, Paris 2007, éd. Picard; Les cathares. Albigeois et "bons hommes", Luçon 2008, éd. Jean-Paul Gisserot.

9 La croisade albigeoise, Paris, 1979, éd. Gallimard; Sous sa di rection les œuvres collectives Inventer l'hérésie ? Discours polémiques et pouvoirs avant l'Inquisition, Nice, Centre d'études médiévales, 1998; L'histoire du catharisme en discussion. Le concile de Saint-Félix, 1167, Nice, Centre d'études médiévales, 2001. «Du court moment où l'on appela les hérétiques des <bougres> et quelques déductions», Cahiers de civilisation médiévale 32 (1989), p. 304-324; «Ç érésie» dans J. Le Gof, J. C. Schmitt dir., Dictionnaire raisonné de l'Occident médiévale, Paris 1999, éd. Fayard, p. 464-482.

10 Des contestateurs aux «cathares », Paris, 2006, Institut d'études Augustiniennes ; «Cathari, catharistae et Cataprygii, ancêtres des cathares du XIIe siècle ?», Heresis 36-37, 2002, p. 183 -200.

11 Les sources principales antihérétiques contre les bogomiles sont les suivantes: Cosmas le Prêtre , Slovo na eretiki, éd. M.G. Popruzenco, Odessa, 1907, trad. Vaillard. A, Puech H. C .,  Le traité contre les Bogomiles, Paris, 1945, p. 53-128. Euthyme de la Péribleptos, Epistula Invectiva contra Phundagiagiten, PG 131, col. 48-57, éd. Ficker G . , Die Phundagiagiten: Ein Beitrag zur Ketzergeschichte des byzantinischen Mittelalters, Leipzing 1908, p. 1-86. Michael Psellos ,   Dialogus de daemonum operatione, PG 122, col. 819-882. Euthyme Zigabène ,   Panoplia Dogmatica, PG 130, col. 1289-1332.

12 D'où par exemple, l'importance que le Père A. Dondaine attribuait à la découverte des nouvelles sources pour les études sur le catharisme, ce qui explique qu'il ait consacré une dizaine d'années de sa vie académique à cette fin. Cf. note 5.

13 Zerner M., «La charte de Niquinta, l' hérésie et l' érudition des années 1650-1660», dans M. Zerner dir., L'Histoire du Catharisme en discussion, Le concile de Saint- Félix (1167), Collection du Centre d'Études Médiévales de Nice, v.III, 2001, p. 203-248.

14 Cf. G. BEDOUELLE, "Les Albigeois, témoins du véritable Évangile : l'historiographie protestante du XVIe et du début du XVIIe siècle", Cahiers de Fanjeaux °14, Toulouse, Privat, 1979, p. 45 sq. (cf. p. 56 sq.). Dès 1572, au Synode des Églises Réformées, tenu à Nîmes, la question de la publication de "l'Histoire des Albigeois" est à l'ordre du jour. Au synode, tenu à Montauban en 1595, les Réformées essaient de montrer que leur credo est plus ancien que celui de l'église catholique romaine. Comme le constate R. Poupin dans son article " Points de repère d'une histoire des origines du basculement dualiste en Occident médiéval ", note 3: «le pasteur Jean Chassanion publiera peu après son Histoire des Albigeois revendiquant la filiation catharisme/valdéisme - protestantisme. En juin 1602, le Synode des Églises Réformées du Dauphiné charge le pasteur Dominique Vignaux de rassembler tous les documents utiles à cette fin — ils sont présentés par son fils Jean Vignaux au Synode national de Gap en 1603. Le Synode du Dauphiné confie au pasteur Jean-Paul Perrin le travail d'historiographie concernant les vaudois et albigeois, qui sera publié en 1618». cf. aussi l'étude récente de Michel Jas, Incertitudes, Les Cathares à Montpellier, éd. Beziers : Institut d'études Occitanes, 2007 ou l'auteur évoque la réappropriation du catharisme par les protestants réformés ( Synode de Nîmes en 1572 et le Synode de Montauban, en 1595).

15 Rituel Cathare, éd. Thouzellier C., SC 236, Paris, 1977. Jean de Lugio , Liber de duobus principiis, Un traité néo-manichéen du XIIIème siècle, éd. A. Dondaine, Rome, 1939.  ; Le livre des deux principes, éd. Thouzellier C., Paris, 1973. « Les actes du Concile Albigeois de Saint -Félix de Caraman. Essai de critique d'authenticité d'un document médiéval », A.Dondaine Miscellanea Giovani Mercati, t. V., Studi e Testi, 125, Roma, 1946.

16 Le livre secret des Cathares, Interrogatio Iohannis, Apocryphe d'origine bogomile, éd. E. Bozoky, Paris, 1980.

17 Pour une autre analyse des implications du déconstructionnisme sur les études cathares cf. le fort intéressant article de Michel Roquebert,   "Le d éconstructionnisme et les études cathares ", dans Les cathares dans l'histoire, Cahors, 2005, p. 105-133.

18 "Les nouvelles tendances de la recherche historique sur la catharisme, critique ou révision?", communication auprès de la Société d'Histoire du Protestantisme Français, Nîmes, 8 avril 2000.

19 ' Le poids du contexte ', Hérésie et inquisition, p.116

20 'Réflexions s ur «l'hérésie» dans le Midi de la France au Moyen Age ', Heresis 36 -37, 2002, p. 41.

21 'Le «catharisme» une histoire en devenir ', Hérésie et Inquisition dans le midi de la France , p. 16.

22 Cf. par exemple Moore R. I., « Nicétas, émissaire de Dragovitch, a-t-il traversé les Alpes ? », Annales du Midi (1973), p. 85-90 ; Zerner M., La charte de Niquinta, l' hérésie et l' érudition des années 1650-1660, dans M. Zerner dir.,  L'Histoire du Catharisme en discussion, Le concile de Saint- Félix (1167)  , Collection du Centre d'Études Médiévales de Nice, v.III, 2001, p. 203-248. Biget J. L., « Un faux du XIII ème siècle ? Examen d'une hypothèse  », dans M. Zerner dir.,  L'Histoire du Catharisme en discussion, Le concile de Saint- Félix (1167)  , Collection du Centre d'Études Médiévales de Nice, v.III, 2001, p. 105-133.

23 ci-dessus note 22.

24 Des contestataires aux "cathares": discours de réforme et propagande antihérétique dans les pays du Rhin et de la Meuse avant l'Inquisition, Paris 2006, éd. Institut d'études augustiniennes; «Cathari, Catharistae et Cataphrygae ancêtres des cathares du XII ème siècle ? », Heresis 36-37 (2002), 183- 200.

25 Ainsi, J. Théry maintient sur des questions méthodologiques que «privilégier de trop hypothétiques origines exogènes de la dissidence mène, pourrait- on renchérir, à en négliger les causes profondes, qui sont à rechercher dans les contextes socio - politiques locaux, en relation avec l'état général des pouvoirs dans les sociétés concernées»: cf. «L'hérésie des Bons Hommes, Comment nommer la dissidence religieuse non vaudoise ni béguine en Languedoc ?», Heresis 36 - 37 (2002), p. 74. D'après les propos de J. L. Biget : «l'hérésie naît en un temps, en une région et en une société, des conditions et des problèmes de ce temps, de cette région et de cette société . Elle n'est pas une importation d'ordre purement idéel, qui se développerait hors de toute saison, sur n'importe quel terroir, par le plus grand des hasards» . Cf. 'Réflexions s ur «l'hérésie» dans le Midi de la France au Moyen Age ', p. 66, Heresis 36 -37, 2002 (=" Le poids du contexte', Hérésie et Inquisition dans le midi de la France, éd. Picard, p. 134).

26 Sur l'opposition des bogomiles à l'Eglise orthodoxe cf . Cosmas le prêtre, Le traité p. 77 et aussi Euthyme Zigabène, Panoplia Dogmatica, PG 130, 1321c ; 1325a.

27 Cf. Le Nouveau Testament traduit au XII e siècle en langue provençale, suivi d'un Rituel Cathare, , éd. Clédat, Paris, 1887, p. IX: Nos em vengut denant deu e denant vos e denant l'azordenament de santa glesia. Cf. aussi sur l'usage des termes sancta Gleisa, Gleisa de Dio dans le Rituel occitan de Dublin et leur conscience d'appartenir à la vraie église de Dieu A.Brenon, Le choix hérétique, éd. La Louve, Cahors 2006, p. 61 - 64.

28 Panopl. Dogm ., PG 130, 1312 b ; Interrogatio Johannis, V 170- 172, D 155-157, p. 72- 73 .

29 Panopl. Dogm., PG 130, 1316a; 1314 a,b; Interrogatio Iohannis, V 177-182 , D161-166, p. 72-74; Ermengaud, Contra haereticos, PL 204, 1253, Allain de Lille, De fide catholica contra haereticos, PL 210, 364, R. Nelli, Ecritures cathares, p. 241.

30 Cf. Interrogatio Iohannis D 255 : Explicit secretum hereticorum de Concorressio portatum de Bulgaria Nazario suo episcopo plenum erroribus.

31'Réflexions s ur «l'hérésie» dans le Midi de la France au Moyen Age ', p. 49 ; 66;, Heresis 36 -37, 2002 (=" Le poids du contexte', Hérésie et Inquisition dans le midi de la France, éd. Picard, p. 121; 136 ).

32 "Hérésie, politique et société en Languedoc (vers 1120-vers 1230)" in Le Pays cathare, op. cit., p. 23.

33 P. Sanchez - Jimenez, dans son article «Aux commencements du Catharisme- La communauté d' <apôtres hérétiques> dénoncée par Evervin de Steinfeld en Rhénanie », Heresis 35 (2001), p. 43 elle estime: «La naissance des communautés d' « apôtres », comme celle dénoncée par Evervin ( de Steinfeld ), ne peut s'envisager que dans le contexte post-grégorien de la première moitié du 12 e siècle où certaines critiques contre le tournant de la réforme se concrétisent dans l'organisation des communautés mixtes (clercs et laïcs) de type apostolique». Cf. aussi J. L. Biget, " Le catharisme, une histoire en devenir", Hérésie et Inquisition dans le midi de la France p. 44 ; « Réflexions sur < l'hérésie> dans le Midi de la France au Moyen Âge », Heresis 36-37, p. 46.

34 'Réflexions sur «l'hérésie» dans le Midi de la France au Moyen Âge " Heresis 36-37, p. 46 -47.

35 'L'hérésie. Approches. Un phénomène occidental', Hérésie et Inquisition dans le midi de la France , p. 97 : «' Il est certain, également que, par un choc en retour, les contestataires de l'Eglise romaine, selon les mécanismes psychologiques bien connus, ont tendance à se conformer, au moins en partie, aux modèles élaborés par leurs persécuteurs '» .

36 Evervin de Steinfeld, Epistula ad S.Bernandum PL 182, 678 a: Vos autem mundi amatores, cum mundo pacem habetis, quia de mundo estis. Pseudoapostoli adulterantes verbum Christi, quea sua sunt quaesiverunt, vos et patres vestros exorbitare fecerunt. Sur la typologie des deux églises Ecclesia Sanctorum - Ecclesia Malignatium chez les cathares cf. Moneta de Cremona, Adversus Catharos et Valdenses libri quinque, V, ii, 1, éd. T. Ricchini, Rome, 1743, p. 410-411. Bonacursus de Milan, Manifestatio Haeresis Catharorum, PL 204, 777. Sur la critique de la dissidence envers le pape Sylvestre cf. Jörg Oberste "Le pape Sylvestre en Antéchrist, pauvreté et ecclésiologie dans le débat sur l'hérésie au bas moyen âge", dans Les cathares devant l'histoire, Cahors 2005, p. 399-405. Chez les bogomiles cf. Le traité de Cosmas le prêtre, p. 77; D'après Euthyme Zigabène, Bethléem symbolisait les fidèles bogomiles, tandis que Hérode ou encore Jérusalem d é signaient l'Eglise orthodoxe. PG 130, 1321c. De même, Nazareth que Jésus quitta pour se rendre à Capernaüm représentait l'Eglise orthodoxe, tandis que Bethléem où le Christ était né, symbolisait la secte PG 130, 1325a. Les Bogomiles étaient les mages qui avaient adoré le Christ en dépit d'Hérode PG 130, 1321c.

37 Cosmas le Prêtre, Le traité, p. 71 ; 73.

38 Ermengaud, Contra haereticos, PL 204, 1253, Allain de Lille, De fide catholica contra haereticos, PL 210, 364, R. Nelli, Ecritures cathares, p. 241. Cf aussi Euthyme Zigabène, Panoplia Dogmatica PG 130, 1314 a - b.

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